Nous sommes à plus de 60 ans de l’invention des pilules contraceptives pour femmes. Les compagnies pharmaceutiques rêvent de fabriquer et commercialiser enfin les pilules contraceptives pour hommes. Nous allons être claires dès le départ, les pilules contraceptives pour homme ne seront commercialisées que d’ici environ dix ans selon les estimations. Les recherches ont commencé en 1970. La tâche est difficile parce que la fonction sexuelle de l’homme est très différente de celle de la femme. En effet, l’homme produit des millions de spermatozoïdes par jour, un seul pourtant est utile pour féconder un ovule. Plusieurs approches ont été considérées : tuer les spermatozoïdes par une augmentation de la température des testicules ; modifier la structure des spermatozoïdes pour qu’aucun n’atteigne l’ovule ou encore bloquer les canaux du sperme. L’approche qui semble se concrétiser c’est d’impacter la spermatogenèse (processus de fabrication des spermatozoïdes) pour que l’organisme n’en produise pas pendant un temps.

L’obstacle à la prise de comprimés oraux

Les découvertes récentes ont montré qu’après l’administration d’androgène comme la testostérone, l’hypophyse de l’homme cesse de sécréter les hormones responsables de la production des spermatozoïdes au niveau des testicules. Seulement, le problème avec la prise de comprimé orale est le fait que la testostérone est très vite éliminée par l’organisme lorsqu’elle est ingérée. Ainsi, pour que le traitement soit efficace, le patient devra prendre les comprimés plusieurs fois dans la journée. On sait pourtant que ce genre d’habitude est difficile à prendre et la forte dose de médicaments fait toujours peur. Conscients de ce problème, les chercheurs ont concentré leurs recherches sur la synthétisation d’une molécule qui serait capable de ralentir l’élimination de la testostérone. Un espoir semble pointer à l’horizon : la dimethandrolone undecanoate plus connue sous les sigles DMAU. Cette molécule pourrait bien être « la » solution, car les résultats des études montrent qu’il serait alors possible de ne prendre qu’une dose de testostérone par jours. Il n’y a pas encore de quoi s’emballer ; il faut encore des études, des analyses et surtout beaucoup d’essais cliniques avant de pouvoir la commercialiser. La moindre apparence d’effets secondaires pourrait inhiber le processus de légalisation de la molécule.

Une étude sur 100 hommes a été faite pour tester l’efficacité du DMAU

Des chercheurs ont entrepris une expérience sur 100 hommes américains entre 18 et 50 ans. Il faut noter que 83 ont été suivis jusqu’à l’aboutissement de l’étude. Trois doses de DMAU ont été testées : 100, 200, et 400 milligrammes avec deux types de formulations : en poudre et avec l’huile de ricin. L’expérience se déroulait comme suit : les 100 hommes furent d’abord divisés en 10 groupes de 10. Puis chaque groupe était divisé en deux : cinq avalaient des pilules et les cinq autres, ingéraient des comprimés inactifs (qui n’a aucun effet). Bien sûr, on ne leur faisait pas savoir s’ils avaient pris de vrais comprimés de DMAU ou des comprimés inactifs. Les participants devraient prendre chaque jour durant 28 jours un comprimé au moment du repas, à une heure fixe. Les chercheurs ont pris la précaution de faire des analyses de sang au début et à la fin de l’expérience. Lorsque l’expérience en est venue à la dose de 400 milligrammes, on a constaté chez les participants ayant ingéré la molécule de DMAU une élimination marquée de la sécrétion de testostérone et de deux autres hormones de la spermatogenèse. Cela est un signe que la contraception est efficace. De plus, ces hommes n’ont pas montré ni rapporté d’effets indésirables néfastes. Cependant, on a constaté chez tous les individus, une légère chute du niveau de HDL (le bon cholestérol) ainsi qu’une légère prise de poids. Ces effets n’ont pas de conséquences sur la santé. On peut donc dire que les résultats de cette expérience de 28 jours sont prometteurs.

À propos des effets secondaires

Comme la pilule contraceptive féminine, il faut s’attendre aux effets secondaires des pilules contraceptives masculines. Les effets vraiment néfastes sont encore à étudier, mais les patients montreront surement des acnés, il y aura des effets sur l’humeur, une diminution du bon cholestérol et des concentrations d’hémoglobine, une augmentation du poids corporelle, une diminution de la libido, une augmentation des marqueurs inflammatoires. Selon des hypothèses (et ce sont seulement des hypothèses), il y aurait une éventuelle augmentation des risques de formations caillots sanguins et des problèmes cardio-vasculaires diverse, cependant, on manque de données pour affirmer cela. Il n’y a non plus aucune étude observée qui montre des effets à long terme (c’est-à-dire plus de trois ans).

La 11β : Une alternative à la DMAU

Selon les données présentées récemment au congrès de la société américaine d’endocrinologie, des chercheurs travaillent sur une autre molécule qui composerait une pilule contraceptive homme est en : La 11β-methyl-19-nortestosterone 17β-dodecylcarbonate (11β-MNTDC). Elle sera prise par voie orale le patient. Puis, lorsqu’elle sera métabolisée en en 11β-methyl-19-nortestosterone (11β-MNT), elle se liera au récepteur de la progestérone et à celui des androgènes. Cela aura pour effet d’arrêter la production de gonadotrophine. Elle a testé sur 40 volontaires masculins sains pendant 28 jours. Après 24 heures de suivi, ceux qui avaient pris le contraceptif ont vu leurs niveaux de testostérone baisser jusqu’au même niveau que ceux des patients atteints de déficit androgénique. On a aussi constaté que si la prise a eu lieu pendant un repas, la diminution est deux fois plus importante. Cependant, les auteurs ont précisé que 28 jours ne sont pas une durée suffisante pour pouvoir observer une baisse effective de la production de spermatozoïdes. Normalement, cette baisse effective se montre au bout de 60 à 90 jours sous un faible niveau d’hormone androgénique. Quoi qu’il en soit, ces résultats sont déjà prometteurs. La 11β-MNTDC est aujourd’hui considérée comme la deuxième pilule contraceptive pour homme après la DMAU (la dimethandrolone undecanoate).

Et qu’en est-il de la contraception masculine par ultrason ?

Ce sont des rats qui ont mis les chercheurs sur cette piste ! En effet, on a constaté que les ondes sonores ont un impact sur la production de sperme chez les rats. La communauté scientifique sait maintenant que les ultrasons sont nuisibles aux spermatozoïdes. Bien que ce fait est connu depuis les années 70, il a été quantifié et mesuré récemment. C’est une équipe de chercheurs de l’université de Caroline du Nord qui a entrepris les études sur l’effet des ultrasons sur les spermatozoïdes des rats. Ils ont publié les résultats dans la « Reproductive Biology and Endocrinology », une revue spécialisée. On s’y attendait : les études ont montré qu’il y a eu une réduction significative du nombre de spermatozoïdes chez les rats. Après quinze secondes d’exposition à des ondes de 1 à 3 Mhz, les spermatozoïdes ont diminué jusqu’à 10 millions par millilitres. L’impact a encore été plus marqué lorsqu’on a réalisé l’expérience sur deux jours dans le l’eau chaude salée. Beaucoup de chercheurs voient cette expérience comme une piste à exploiter pour la mise au point d’une cellule contraceptive pour homme. Un homme est dit stérile lorsque ces spermatozoïdes sont moins de 15 millions par millilitre. Toutefois, ces premiers résultats sont insuffisants pour dire que la méthode est applicable à l’homme. Il faut encore mener des études poussées pour savoir en combien de temps l’effet de la contraception est efficace. Plusieurs questions fondamentales sont encore à répondre : quels sont les effets secondaires ? Quels sont les dangers ? Quels sont les impacts sur le long terme ?